Vers la fin du premier millénaire, les textes anciens parlent de territoires appelés VILLAE en latin, venant de l'ancienne époque Gallo-romaine ayant environ la dimension d'un de nos cantons actuel, et sous la coupe d'un notable (non religieux pas encore seigneur) plus ou moins lié au duc d'aquitaine, (le roi de la Francie occidentale se cantonnait encore entre Seine et Loire). Les églises y étaient rares et appartenaient en privé à de riches propriétaires fonciers.
Dans le VILLA-DEIX, comme ailleurs, on vit alors les plus anciens de ses lieux de culte, ajouter au nom de leur saint celui du territoire dont ils dépendaient.
Ce qui donne par exemple pour Saint Félix (être : deix ou dey) du pays de Villa-DEIX.
Après Charlemagne, la chrétienté devint plus prégnante sous la coupe des Missi-Dominici et vint imposer à ces territoires laïques en perte d'influence, la présence d'un archiprêtré sorte d'abbé supérieur qui relayait localement le pouvoir de l'évêque dans ces anciennes VILLAE.
Vers 964, le Bugue est attesté être un Archiprêtré et le notre dit de St MARCEL a du suivre cette date, avec des St Maurice, St Amand, St Félix, St Michel, et même la Monzie dite de Villadeix. Cet ensemble paraît avoir formé un premier noyau de point religieux avec VIC ou (Vicus 833) qui apparaît en premier en son centre au début du IXe siècle.
L'église de St Martin viendra plus tard, construite vers 1150, sans avoir appartenu à une paroisse du moins à son début.
Photo voûte de l’église de St Martin des Combes
Sa structure de style Gothique à arc brisé avait l'avantage de posséder des piliers intérieurs, ce qui lui permettait de recevoir un plus grand nombre de fidèles grâce à sa surface contrairement aux églises romanes de campagne qui elles autour de l'an mille étaient de simples chapelles à nef unique sans collatéraux ni transept
Nous ne connaîtrons jamais le généreux donateur, qui fit construire ce monument important. Cependant la position exiguë de l'église au bas du massif qui longe le court d'eau du Ribeyrol, et descend vers le Caudeau, laisse penser que son créateur en était le seigneur féodal.
Il paraît évident que pour sa construction, il a du faire participer toute la population locale en demande d'église et aussi en allant chercher ailleurs un savoir faire architectural pour ce chantier.
Cependant, si ce texte qui apparaît ici, ne nous donne pas le nom de ce riche créateur, (appelons le Guillaume), c'était un des noms les plus fréquents à cette époque pour l'aîné d'une fratrie.
Et bien oui, il a bien existé ce fameux Hellie, qui était devenu curé pour servir l'église que son frère aîné le seigneur en titre (par son droit d'aînesse) avait fait faire pour lui, ce qui lui donnait en tant que religieux la même honorabilité que l'aîné de la famille.
Preuve supplémentaire, il est question de son neveu dit Geoffroy, (donc fils de Guillaume) celui-ci avait reçu en héritage une chapellenie, sorte de paroisse privée dont les revenus lui permettait d'en vivre tout en gardant en propre ce bien dans le patrimoine familial.
Ceci est très important et apporte la preuve supplémentaire que l'église de St Martin fut édifiée par un notable laïque et non par un religieux comme cela aurait pu être le cas par l'évêque ou l'archiprêtre. Le tournant de l'histoire est qu'en 1076, le pape Grégoire VII avait imposé une règle qui obligeait les possesseurs laïques de lieux de cultes privés de les restituer aux abbayes soumises à Dieu. Donc en 1169, l'évêque du Périgord, PIERRE MIMET tout juste installé pris la décision de rétrocéder notre église des combes à la Sauve Majeure, et il avait de bonne raison pour cela car étant un ami de Pierre de Blois, troubadour à la cour d'ALIENOR D'AQUITAINE, celui-ci lui avait fortement conseiller de favoriser l'abbaye fétiche de cette puissante dame par un maximum de dons ecclésiastiques. Il en fut remercié (l'évêque Pierre Mimet) car en 1199, il participa au voyage que fit ALIENOR pour ramener l'infante future Blanche de Castille en vue de la marier à Louis VIII, fils de Philippe Auguste.
La Sauve Majeure est une abbaye qui est apparût en limite nord des Landes vers 1080 au moment de la reforme Grégorienne, elle draina vers elle tous les dons venant de l'aquitaine que possédait Alienor, dernière de la lignée des ducs. L'influence bénédictine de cette abbaye lui venait de Cluny (913) et de Monté-Cassino (510) en Italie où avait vécu SAINT BENOIT.
En 1107, elle reçut l'église de CREYSSE, avec ses rentes ou s'ajoutèrent en 1169, celles de l'église de ST MARTIN qui toutes allèrent plus tard au prieuré ST JACQUES de la VERGNE à CLERMONT, sorte de petite abbaye dépendante de la Sauve, avec quelques moines en refut de tout bien personnel et de toutes idées de propriétés toujours dans un but non lucratif de son épanouissement le cadre de cette réforme voulait que tout ce qui était du religieux revienne à Dieu, et non aux hommes.
Les restes de la Sauve Majeure se visitent encore et méritent bien d'y faire un détour lors d'un week-end, alors le visiteur sera surpris de l'ampleur gigantesque qu'avait ce monument avant que la rapacité morbide des révolutionnaires de 1792, l'ait pratiquement détruit, ceux-ci en pensant construire en avaient perdu le sens du beau.
La Sauve Majeure, façade occidentale par William Ellison
Le texte qui suit, fut écrit par ARNAUDI, écolâtre ou maître d'école de la cathédrale ST ETIENNE de la CITE (reste historique de l'époque Gallo-romaine) qui nous donne les témoins présents ou pas à cet acte. Etonnamment sont absents, le curé HELIE de ST MARTIN, l'archiprêtre de St MAURICE, et GEOFFOY, fils du seigneur qui en tant que chapelain avait en garde le petit sanctuaire dit de ST MICHEL au-dessus de la fontaine ! Dans l'ancien cimetière des pauvres (les riches avaient leurs caveaux personnels dans l'église !) ainsi que les revenus d'un territoire privé appelé fief donné par son père en héritage qui sera l'embryon de la future paroisse. N'y était pas non plus l'abbé supérieur de la Sauve, (PIERRE de DIDONNE) considérant sans doute que cela ne valait pas le déplacement.
L'évêque seul semble être à l'initiative de cette donation, puisqu'il s'entoura uniquement des responsables religieux les plus influents de l'évêché, comme le doyen du chapitre et les archidiacres qui ne pouvaient qu'approuver sa décision.
MS 770 OPUS CULA du petit cartulaire de la Sauve Majeure
Voici notre traduction de l'original du XIIe, (faite avec les réserves d'usage) trouvé dans le petit cartulaire de cette abbaye (sur un rouleau de parchemin) où est montré tout le contexte religieux du pays, au moment de la donation de notre église, faite à la Sauve Majeure par notre évêque, nous sommes vers le milieu du XIIe, qui voit la religion monter en puissance pour compléter son implantation dans ces territoires encore peu peuplés (appelés déserts) et en cours de défrichement. La raison invoquait dans les textes était qu'il y avait trop de distance à parcourir par les croyants, pour rejoindre les lieux de cultes voisins à cause des chemins impraticables, soit pour baptiser les nouveaux nés, (moins de deux jours) ou pour aller à la messe et même porter les morts au cimetière convenu, ce qui du point de vue religieux était obligatoire.
L'Implantation des églises s'est faite progressivement dans le temps au pays du VILLADEIX comme ailleurs, avec des vocables ayant des noms de saints mérovingiens du Ve siècle, comme Saint Martin qui réapparaît ici.
(Toi) PIERRE (MIMET) évêque de l'église Périgourdine (qui) par la grâce de dieu et la
charité (qu'il y a) entre deux frère (un autre) PIERRE (de DIDONNE) et ses successeurs
(à venir) et à perpétuité. Toi évêque qui par convention possède le pouvoir de
transmettre la puissante religion et jette par pensée un regard attentif à l'issue
(qui sera donnée) à cet abondant bénéfice et par l' attachement et la bonne opinion
qu'il a de cette personne (l'abbé de la Sauve) décrète que soi jointe à toi PIERRE
(de DIDONNE) qui attend l'église de St MARTIN des COMBES avec l'assentiment
et avis de :
GUILLAUME GEOFFROY archidiacre (siégeant à l'évêché pour le PERIGORD sud)
et aussi sur les conseils d'AYMERIC, archiprêtre (habitant de St MARCEL) et
d'un pasteur HELLIE presbitero (curé dudit) St MARTIN et de même avec son neveu
GEOFFROY chapelain ayant les mêmes droits (et devoir) en ladite église (celui-ci percevait
aussi des rentes privée sur une chapellenie que son père lui avait constitué) tant dans
tout le territoire universellement rassemblé (en fief) autour de l'église qu'ailleurs.
(Sachons) que toi PIERRE (MIMET) concède par dignité épiscopal et à perpétuité
en entière possession cette intègre concession faite à la Sauve Majeure.
(La raison réelle était de combattre la Simonie car tout ce qui est du religieux doit appartenir à DIEU).
Tandis que cette donation s'est faite dans le droit et avec l'accord de la communauté
(du chapitre) des frères de notre cathédral ecclésiastique autant par raison que par consentement avec une pension annuelle perçue de 12 deniers de monnaie Périgourdine trouvée par les prédits frères dans le trésor (archives) de St ETIENNE pour la dite église.
Les témoins de cette donation (ne sachant signer ?) furent :
ITERIUS doyen du chapitre avec GEOFFROY de VERN et GUILLELMUS de
CARROFIO (charroux) chanoines de St ETIENNE .
HELLIE de CAROFIO chapelain.
PIERRE de SYORAC et GALLARDUS (Gaillard) moines.
Tandis que cette donation favorisée dans la paix par cette ancienne assemblée il fut
rédigée par écrit notre convention sur une page blanche et soussignée par.
Moi PIERRE évêque de PERIGUEUX
Moi ITERIUS doyen du chapitre
Moi HELIAS cantor (maître de cérémonie)
Moi GUILLELMUS GAUFRIDI archidiacre
Moi GUILLELMUS JORDANI archidiacre
Moi ARCHAMBAUDUS archidiacre
Moi HELIAS de MAROLIO (mareuil) archidiacre
Moi ADEMARUS de TURRE (turenne) archidiacre
Cela fut daté par moi ARNAUDI (écolâtre) maître d'école de l'église Périgourdine année
de l'incarnation du CHRIST M CC L NONA Pape ALEXANDRE III (1159-1184)
LOUIS VII Roi de FRANCE et HENRI II Roi d'ANGLETERRE et duc d'AQUITAINE
par son épouse ALIENOR.
Il est à remarquer que les noms des personnages qui apparaissent dans ce texte, sont tous d'origine germanique et dont beaucoup existent encore, étant un reste de l'invasion FRANQUE de CLOVIS du VIe siècle.
Rapidement dans le XIIe, la religion imposa d'abord à une élite féodale puis aux gens simples la nécessité de différencier le père du fils par le prénom d'un saint au moment du baptême. C'est l'époque ou chaque génération, en suivant une mode a fait refleurir l'ancien testament et les disciples du Christ. Les noms de lieux eux resteront Gallo-Romain et seront à l'origine des patronymes de ceux qui les ont habités.
Michel BESSE